DE VOUS À NOUS
DE VOUS À NOUS
Le design graphique, souvent perçu comme un ensemble de métiers disparates, gagne à être repensé comme un champ d’action cohérent en pleine expansion. La question centrale est : comment articuler les multiples facettes contemporaines du design graphique dans un cadre académique contemporain et porteur de sens ? Il est urgent de proposer une lecture structurée, intégrée et critique du rôle du design graphique dans nos environnements culturels, sociaux et technologiques.
Le design graphique s’inscrit dans une tradition de communication visuelle, mobilisant les concepts de sémiotique (Barthes), de Gestalt (perception visuelle), ainsi que de design critique (Norman, Kress & van Leeuwen). Ce cadre théorique permet d’analyser les productions graphiques non comme des objets esthétiques déconnectés, mais comme des dispositifs signifiants, culturels et cognitifs. Cette approche est renforcée par des recherches académiques récentes qui mettent en lumière la multiplicité des spécialités du design graphique.
L’AIGA, dès 2001, identifiait une vaste palette de spécialisations : identité, publicité/promotion, editorial, signalétique, interaction, motion, packaging, information, production design. Cette diversité s’est aujourd’hui densifiée avec l’avènement du numérique, l’essor du design environnemental (XGD), et la montée de l’expérience utilisateur immersive.
Identité visuelle (logos, systèmes graphiques, cohérence de marque) ; elle forme le socle de la reconnaissance visuelle. L’identité visuelle repose sur la cohérence des signes (couleurs, formes, typographie), et agit comme un récit visuel qui porte les valeurs et l’histoire d’une marque.
Design éditorial ; structurer et rythmer les contenus écrits implique non seulement une mise en page, mais aussi le jeu dynamique entre lisibilité, images, hiérarchie visuelle et temps de lecture pris en charge par le lecteur.
Publicité ; il s'agit de capturer l’attention, de marquer la mémoire et d’inscrire un récit visuel symbolique, souvent à travers des codes émotionnels et culturels, parfois revisités de manière critique.
Digital (UI/UX) ; l’interface utilisateur exige une ergonomie intuitive, un parcours fluide et un transfert visuel clair. Les compétences des designers d’UI/UX sont à la fois techniques (wireframes, prototypage) et humaines (soft skills, "malleable skills").
Motion design ; animer l’image, c'est plus que bouger des formes, c'est créer des temporalités visuelles, articuler rythme, intention et émotions.
Packaging ; espace tangible du produit, le packaging combine formes, typographie et une stratégie perceptive accrue. Des recherches récentes mêlant vision par ordinateur et psychologie cognitive montrent l’importance de la visibilité visuelle du logo et de l’attention visuelle générée, ouvrant une dimension scientifique à ce domaine.
Design de l’information ; transformer la complexité en clarté est l’essence même du design de l'information. Ce domaine croise sémiotique, Gestalt, cognition et cartographie, et s’applique à tout support, de l’interface numérique à la signalétique muséale.
Signalétique / expérientiel ; le design environnemental (XGD) réinvente la signalétique comme un dialogue immersif entre espace et langage graphique, combinant architecture, design visuel et interaction sensorielle.
Typographie ; loin d’être un simple choix de police, elle incarne le rythme, la voix, la personnalité du texte. Une typographie bien pensée rend la lecture plus sensible et le message plus vivant.
Au-delà de leur spécialisation, ces domaines coexistent dans un continuum où chaque savoir-faire puise dans les mêmes principes perceptifs et sémiotiques. Le design graphique contemporain devient un écosystème interactif, où l’identité se déploie dans le digital, le packaging dialogue avec l’UX, la typographie tempère le motion ou la publicité. Cette corrélation ouvre une proposition : plutôt que de traiter chaque discipline comme cloisonnée, il faut les penser comme modules interconnectés d’une même langue visuelle. Cette perspective favorise la création hybride, la résilience critique et l’innovation esthétique.